Connu sous le nom américain de The Happytime Murders (littéralement "Les Joyeux Moments Meurtriers"), le long métrage sort d'abord au Québec sous le titre de Carnage chez les Joyeux Touffus le 24 août 2018, s'amusant ainsi du double sens du mot Touffu, tandis que le film sort en France le 19 septembre 2018 sous le titre de Carnage chez les Puppets, faisant ouvertement référence aux Muppets. Le long métrage est proposé dans deux versions francophones, les dialogues étant quelquefois plus édulcorés ou plus marqués selon les versions.
Bien que l'équipe de production se soit amusée à brouiller les pistes en faisant apparaître dans le générique le nom de sa filiale Henson Alternative, il s'agit bel et bien d'un film produit par Jim Henson Company. Toutefois, ce film ne fait bien évidemment pas du tout parti du catalogue Disney qui ne détient les droits que des Muppets.
Dans un monde où les hommes et les marionnettes cohabitent, deux détectives, un humain et une marionnette, sont forcés de travailler ensemble pour résoudre une affaire de meurtres dont les victimes sont les anciens membres de la distribution de Happy Time Gang, un show de marionnettes très populaire trois décennies plus tôt...
Lorsque Brian Henson a repris en main l'avenir des Muppets durant les années 1990, il lui a été reproché d'avoir considérablement aseptisé les joyeuses marionnettes loufoques. Le fait que les deux premiers longs métrages de la décennie aient été produits en collaboration avec Disney n'a fait qu'accentuer ce ressentiment général. Pour autant, ses films n'étaient pas foncièrement mauvais, ils étaient juste très différents. Durant les années 1980, son père, Jim Henson, était assurément plus à l'aise dans sa façon de placer les personnages parfaitement à mi-chemin entre l'impertinence à destination des adultes et le côté mignon à destination des enfants. Le curseur s'est un peu décalé vers le second public sous l'ère de Brian Henson, sans que cela ne soit réellement de son fait, cela étant dit. Il est tout à fait logique que des concessions ont été faites, tout comme le studio Disney a pu demander une modification de leur caractère. Il est également possible que toute l'équipe ait simplement voulu explorer une autre façon d'utiliser les personnages. Tout est possible. Il n'empêche, ce changement de cap a déplu à une partie du public, mais également à certains de leurs créateurs, notamment Frank Oz qui n'y est pas allé de main morte depuis que les Muppets ont été rachetés par Disney. Quand j'ai eu vent de l'existence de Carnage chez les Puppets, je me suis dit que Brian Henson avait visiblement voulu se racheter. Problème, il a poussé cette fois-ci le curseur beaucoup trop loin dans l'autre sens. Ce qui, au final, revient à peu près au même que ce qu'on lui reprochait durant les années 1990.
Depuis la naissance de Kermit, il y a déjà plus d'un demi-siècle, Jim Henson Company s'est entièrement dédiée à la conception d'effets spéciaux à base de marionnettes. Elle a contribué à de très nombreuses productions, principalement américaines, que ce soit pour les enfants (Sesame Street, Fraggle Rock), pour des films expérimentaux (Labyrinthe, Dark Crystal), voire même pour des séries télévisées (Farscape). Même Star Wars lui doit beaucoup, car il y a peu de chances que Yoda ait pu naître sans Kermit avant lui. Assez ironiquement, tout ce qui avait pourtant fait la gloire de Jim Henson a finalement été éparpillé aux quatre vents et les droits récupérés par d'autres studios. Des vrais films de marionnettes entièrement produits par Jim Henson Company, ça faisait plus de trente ans qu'il n'y en avait plus eu aucune. Carnage chez les Puppets c'était déjà, avant de mettre le nez dans le synopsis et la bande annonce, une étonnante surprise. Peu après par contre, le long métrage est devenu assez douteux. On n'entrait clairement plus dans la catégorie des films de marionnettes allumées. Non, tout au contraire, Carnage chez les Puppets plonge dans un côté extrêmement trash, proposant en hors d'oeuvre un véritable déluge de vulgarité et de violence purement gratuite, histoire de marquer le coup. Certes, on est assez loin du concept de Sausage Party - La vie privée des aliments, qui était allé largement plus loin que Carnage chez les Puppets, mais c'est un peu dans le même esprit.
En comparaison, dans les très grandes lignes, Carnage chez les Puppets n'est pas foncièrement un mauvais film. La toile de fond du récit est assez cohérente, tout comme le choix de parodier les films noirs des années 1920 et 1930. Un peu comme l'avait également fait Qui veut la peau de Roger Rabbit en somme. Le long métrage se place dans la continuité logique des aventures des Muppets, à savoir que les personnages ont désormais pleinement été intégrés à la société humaine. Sauf qu'un évènement traumatique, provoqué involontairement par Phil Philips, a entraîné un rejet massif de la population pour les marionnettes. La société qui les avait accueillies s'est retournée contre eux et la population est même devenue raciste à leur propos. Carnage chez les Puppets aborde des thèmes totalement dans l'air du temps, en y ajoutant aussi une dimension féministe et un peu de burlesque. Cependant, j'ai vraiment du mal à comprendre l'intérêt d'avoir poussé aussi loin le curseur vers la vulgarité. Car non seulement cela n'apporte absolument rien à l'ensemble, mais en plus, ça plombe littéralement l'ambiance du film. On en vient donc à se dire que Carnage chez les Puppets a adopté cette ligne de conduite pour la seule et unique raison de réussir à exister dans la polémique. Un pari réussi haut la main d'ailleurs, vu le foin qu'avait provoqué les auteurs de Sesame Street qui n'avaient pas vu d'un très bon oeil un long métrage venir salir leur réputation lors de la diffusion de la bande annonce qui leur faisait un clin d'oeil outrancier.
Carnage chez les Puppets est cependant un paradoxe à lui tout seul. Si on arrive à passer outre les dialogues limites obscènes, qui ne servent absolument à rien car pas franchement drôles, ainsi que certains scènes finalement assez violentes, même si elles sont compensées par le fait que ce sont des peluches qui les subissent, le long métrage arrive un petit peu à s'avérer sympathique sur la durée. Même si on voit venir la plupart des rebondissements ainsi que le twist final comme un train entrant en gare, la relation entre les personnages fonctionne plutôt bien, notamment entre Phil Philips et Connie Edwards, dont le côté excessif du personnage, tout comme le jeu sans finesse de Melissa McCarthy, trouve une explication logique dans le film. Dans le fond, Carnage chez les Puppets suit assez fidèlement la trame des films noirs du siècle dernier, on y retrouve absolument tous les poncifs du genre, jusqu'à la secrétaire transite d'amour à sens unique pour son patron le détective. Pour ce qui est de la technique, Jim Henson Company est à l'oeuvre et ça fonctionne très bien. Comme à leurs habitudes, c'est le travail réaliste qui est majoritairement privilégié pour animer toutes les marionnettes. Les effets spéciaux numériques n'étant là que pour appuyer une scène complexe ou effacer les animateurs hors du cadre des scènes. Dans les faits, de ce point de vue, Carnage chez les Puppets reste une réussite car les marionnettes se font très rares au cinéma.
Que retenir de Carnage chez les Puppets ? En vérité pas grand chose. Le scénario du film est très basique en fin de compte. Il propose, peu ou prou, à peu près la même chose que n'importe quelle autre production parodique du même genre. Certes, les marionnettes et Melissa McCarthy s'avèrent plutôt sympathiques, mais c'est à peu près la seule vraie bonne chose de l'ensemble. Le problème vient surtout du côté trash assumé, particulièrement du côté des dialogues un peu excessifs et fatigants, qui n'a pas vraiment lieu d'être. Le long métrage s'en serait probablement mieux sortis sans, mais aurait sans nul doute été bien moins connu qu'il ne l'ai à peine déjà. Quelques scènes s'avèrent toutefois explosives, dans le sens premier du terme, disons même assez jubilatoires, à un point que si des humains avait été de l'autre côté de la ligne de mire, le film aurait sans aucune doute été classé interdit aux mineurs. Des situations qui feront sourire en coin les adultes, mais qui traumatiseront à coup sûr les jeunes têtes blondes, Carnage chez les Puppets ne s'adressant, de toute façon, absolument pas à eux. Entre les deux, les ados trouveront sans doute tout cela ennuyeux à mourir car ils passeront à côté de toutes les références. Bref, dispensable.
Olivier J.H. Kosinski - 03 février 2022
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Doublage (Québec - 2018)
Détective Connie Edwards : Pascale Montreuil
Lieutenant Banning : Patrick Chouinard
Jenny : Viviane Pacal
Phil Philips : Louis-Philippe Dandenault
Sandra : Anne Dorval
Agent Campbell : Maël Davan-Soulas
Larry : Hugolin Chevrette
Doublage (France - 2018)
L'Inspecteur Connie Edwards : Melissa McCarthy
Phil Philips : Bill Berretta
Bubbles : Maya Rudolph
Lieutenant Banning : Leslie David Baker
Jenny : Elizabeth Banks
Agent Campbell : Joel McHale
Sandra : Flora Brunier
Larry Philips : Victor Yerrid
Lyle : Kevin Clash
Ronovan Scargle : Michael McDonald
Goofer : Drew Massey
Vinny : Drew Massey
Puppet docteur : Allan Trautman
Puppet dansant : Victor Yerrid
Kerry : Sébastien Desjours
Roxy : Gérard Darier
Voix additionnelles :
- Jean-Claude Donda
- Dorothée Pousséo
- Emmanuel Karsen