Hansel et Gretel - Agents Secrets sort en salles le 18 mars 2021 en Russie. Il est cependant distribué directement sur Netflix à l'international quelques jours après, le 25 mars 2021. Le long métrage dispose d'une version française identique quelque que soit le pays francophone.
Hansel et Gretel ont bien grandi. La jeune fille est devenue un agent secret d'élite, la fine fleur de tout le Royaume auquel aucun criminel ne résiste. Son frère, par contre, est devenu un prestidigitateur de pacotille, abusant de la crédibilité des habitants pour se remplir confortablement les poches. Mais un jour, le Roi est kidnappé par Ilvira, l'ancienne cuisinière en chef du château, qui veut assouvir son besoin de domination du monde. La fratrie doit mettre de côté les querelles familiales pour partir à sa rescousse...
En produisant sept films en moins de dix ans, le studio d'animation russe Wizart Animation est passé de l'outsider improbable au studio qui prend du galon. Le studio est né, plus ou moins, afin de redorer le blason de l'ancien pays plus grand producteur d'animation au monde durant l'ère URSS (plus de 1500 réalisations en 45 ans) et jusqu'à son éclatement conduisant au démantèlement du célèbre studio Soyuzmultfilm. Personne ne croyait en sa réussite, d'autant plus que leur tout premier film de 2013 capitalisait, sans scrupule, sur le succès faramineux de La Reine des neiges produit par Disney. Cependant, depuis lors, Wizart Animation a tracé son chemin. Il s'est émancipé tout en réussissant à trouver sa propre voie, qui tend d'ailleurs de plus en plus vers l'international. Chacune de leur production affine leur travail, qui s'améliore à chaque fois un peu plus, même si le studio se concentre principalement sur une unique franchise, qui tourne autour de Gerda. Depuis 2013, il n'y a eu qu'une seule vraie erreur de parcours avec Gare aux loups 2 - Tous à table !, véritable acte manqué du studio. Cependant, proposé juste après, La princesse des glaces - Le monde des miroirs magiques prouvait que le studio en avait encore dans le ventre. Hansel et Gretel - Agents Secrets a donc bien évidemment attisé ma curiosité depuis quelques mois. Wizart Animation se décidait à proposer un tout nouvel univers. Originellement pensé pour une sortie en salle en Russie, la surprise fut de taille en découvrant que le long métrage était finalement proposé directement sur Netflix à l'international, ainsi qu'en France, presque en catimini et sans aucun effet d'annonce.
Rien qu'à partir de son titre, Hansel et Gretel - Agents Secrets, et même à travers ses premières bandes annonces où l'on ne comprend rien au russe, on a vite compris qu'il s'agit apparemment d'une comédie d'espionnage. Le genre est hyper représenté dans l'animation, on la décline à peu près à toutes les sauces depuis des décennies dans tous les studios d'animation à travers le monde. Chacun y est allé de sa propre interprétation, et de sa propre mythologie, avec pour seul point d'orgue commun à tous : faire rire son public. La comédie d'espionnage animée est toutefois un jeu d'équilibriste subtil qui peut se révéler très casse gueule. L'histoire doit être cohérente, censée dans un sens, tout en se voulant totalement farfelue dans les actions des personnages. La majorité du temps, le genre impose aussi d'avoir une très grande connaissance de la fiction d'espionnage, sinon les références les plus succulentes ne peuvent pas être comprises, ce qui ajoute un second niveau de lecture seulement accessible aux adultes. Enfin, c'est surtout dans les productions occidentales et américaines que l'on retrouve ce principe. La Russie prouve qu'elle a son approche bien à elle, en offrant quelque chose de relativement inédit. Dès le prologue où le Roi d'un pays sans nom se fait kidnapper par un plat de spaghettis bolognaise magique en s'envolant à travers une fenêtre ouverte, on a tôt fait de comprendre que Hansel et Gretel - Agents Secrets va plonger de plain-pied dans l'absurde.
Pendant plus de trente minutes, Hansel et Gretel - Agents Secrets s'échine à caricaturer la caricature de la comédie d'espionnage enfantine, sacré programme. Le long métrage fait dans l'excès, poussant tous les curseurs du n'importe quoi dans la gaieté et la bonne humeur. A tel point d'ailleurs que le long métrage en devient pesant, épuisant, parce qu'il en fait beaucoup trop. A ce stade, le long métrage rappelle par moment l'impopulaire Shrek le Troisième où trop de potache tue le potache, particulièrement cette mode insupportable de la légion de minions déclinée à toutes les sauces et popularisé par Moi, Moche et Méchant. Paradoxalement, ce qui s'avère finalement être une très longue introduction de demi-heure prend le temps d'installer une jolie ambiance et de connecter les spectateurs avec la fratrie des célèbres personnages du conte qui ont grandi et ont drôlement changé. Gretel devient la baroudeuse qui ne vit qu'à travers son travail exclusivement tout en prenant tout le monde de haut, tandis que Hansel est un affabulateur charmeur qui adore détrousser le quidam. Bien évidemment, le kidnapping invraisemblable du Roi met l'agence secrète, qui emploie Gretel, en émoi. Cette affaire inhabituelle, qui dépasse de loin tout ce qu'ils connaissaient jusque-là, va nécessiter les compétences douteuses de Hansel. Le frère et la soeur qui ne se supportent pas vont devoir faire front commun pour délivrer leur monarque. Le contexte est posé, encore faut-il s'accrocher jusque-là.
Parce que, passé la 35e minute exactement, tout juste après une séquence surréaliste accompagnée d'un magistral déferlement de couleurs orchestré d'une main de maître par Wizart Animation, par un habile tour de passe-passe, Hansel et Gretel retrouvent de manière inopiné l'âge de leur enfance. Dès lors, semblant de fait prouver que le studio d'animation Russe ne sait pas du tout gérer correctement ses personnages adultes, on se retrouve enfin propulsé en terrain connu. Wizart Animation retrouve soudain complètement ses marques. On jure sur l'honneur être incontestablement retourné dans le même univers que celui de Gerda, mais dont l'action est simplement délocalisée dans un royaume fort fort lointain. C'est tout à fait normal en même temps, vu que les réalisateurs et les scénaristes sont exactement les mêmes que la grande saga en quatre actes de Gerda, les références internes et autres clins d'oeil y sont légions. Toujours est-il que, passé ce cap, Hansel et Gretel - Agents Secrets délaisse un peu la comédie d'espionnage pour l'aventure rocambolesque qui convient nettement mieux à l'intrigue jusqu'au dénouement final. Hansel et Gretel vivent une très sympathique épopée, rencontrant des personnages hauts en couleurs tout en affrontant des dangers improbables.
Il faut admettre que Wizart Animation met le paquet niveau réalisation, on en regrette d'autant plus que le long métrage soit diffusé de manière si étriqué sur Netflix. Le format cinémascope adopté par le film ne se prête vraiment pas à une diffusion sur la petite lucarne. Visuellement et techniquement, Hansel et Gretel - Agents Secrets est une vrai réussite, dans la lignée immédiate de La princesse des glaces - Le monde des miroirs magiques qui était déjà dans le haut du panier. Pour les besoins de l'intrigue, le scénario intègre habilement de nombreuses références au conte originel des frères Grimm, dont la célèbre piste des petits cailloux. Toutefois, il est fait quelques entorses en y invitant la mythologie russe. La célèbre sorcière cannibale et sa maison en pain d'épices est ainsi scindée en deux personnages. Ilvira d'un côté, une femme qui rêve de devenir Reine à la place du Roi, et qui lui mitone tout un tas de patisseries ensorcellées. De l'autre, la beaucoup plus célèbre Baba Yaga récupère la maisonnette au tréfonds de la forêt, affublé de ces éternelles pattes de poulet géant pour se déplacer, son appétit pour la chair enfantine et son improbable mortier volant. Dès lors, l'aventure se suit avec plaisir, tout en savourant un déferlement de références à Disney inattendues, à commencer par les sirènes dont quatre d'entre elles ressemblent étonnamment à Belle, Cendrillon, Tiana et Ariel jusque dans leurs codes couleurs et vestimentaires.
En fin de compte, Hansel et Gretel - Agents Secrets ne prend réellement son envol qu'à partir du moment où le scénario délaisse la comédie d'espionnage au profit de l'aventure fantastique qui reprend, peu ou prou, les mêmes codes narratifs que les aventures de Gerda. Mais encore faut-il supporter et passer le cap de la première demi-heure, beaucoup trop potache, mais qui semble avoir été pensée pour satisfaire en priorité le public américain très friand de ce genre de spectacle animé décérébré. Wizart Animation ne cachant plus, depuis un moment, son ambition d'être un studio tourné vers l'international capable d'égaler les plus grands. Et il faut donc logiquement en passer par l'ancien frère ennemi américain pour cela. Juste avant de terminer, j'ajouterai que, cette fois-ci, le film n'a subit aucune modification au niveau de la bande originale par rapport à la version russe dans la version internationale, y compris pour la chanson du générique. Ce qui n'est pas plus mal.
Olivier J.H. Kosinski - 16 avril 2021
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Doublage (France - 2021)
Gretel Adulte : Anouck Hautbois
Gretel Enfant : Caroline Combes
Hansel Adulte : Fred Colas
Hansel Enfant : Fanny Bloc
Ilvira : Véronique Augereau
Roi : Gilbert Lévy
Baba Yaga : Cathy Cerda
Agent Belle-Maman : Virginie Ledieu
Agent Belle-Fille : Corine Wellong
Reine des sirènes : Leslie Lipkins
Sources :
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