Chantez ! sort le 21 décembre 2016 au Québec, puis le 25 janvier 2017 en France sous le titre Tous en scène. Une fois encore pour ce studio, bien que le film est réalisé en France, il est produit autour du doublage anglophone puis doublé en deux versions francophones. Certainement par respect pour les chansons, les artistes, mais aussi leurs fans, l'intégralité des numéros musicaux du film ont été conservés en version originale, aussi bien au Québec qu'en France. Cependant, aucun d'entre eux n'est sous-titré durant la projection, même s'il est vrai que cela ne gênera aucunement les enfants qui regarderaient le film puisqu'elles sont surtout là pour divertir sans impact significatif sur l'intrigue.
Buster Moon dirige un grand théâtre, jadis illustre, mais aujourd'hui tombé en désuétude. Buster est un éternel optimiste, un peu bougon, qui aime son précieux théâtre au-delà de tout et serait prêt à tout pour le sauver. C'est alors qu'il trouve une chance en or pour redorer son blason tout en évitant la destruction de ses rêves et de toutes ses ambitions: une compétition mondiale de chant. Cinq candidats sont retenus pour ce défi, chacun d'eux venus pour chercher sur la scène de Buster l'opportunité qui pourra changer leur vie à jamais...
L'affaire est entendue, Tous en scène n'est, ni plus, ni moins, que la réponse de Illumination Entertainment au succès aussi inattendu que faramineux d'un certain La Reine des neiges sorti en salle trois années plus tôt, mais dans un monde contemporain à la Zootopie. Toutefois, à la différence du long métrage de Disney, où les chansons ont été construites dans l'intention principale de servir l'intrigue, en plus d'être des succès album ensuite, Tous en scène résonne complètement à l'envers. C'est au contraire une très large sélection de tubes planétaires, quasiment tous anglo-américains, qui ont été sélectionnés dès le départ et l'intrigue a ensuite été bâti tout autour d'eux. Dès le début de la conception du film, ce sont pas moins de 85 chansons qui furent d'ailleurs annoncées, engloutissant au passage une très large partie du budget pour en garantir les droits d'auteurs de chacune d'entre elles. Dans le montage final, 21 chansons sont finalement passées à la trappe, mais Tous en scène peut encore se targuer d'en compter précisément 64 ! Un record en soit sans nul doute sauf que la quasi-intégralité des chansons ne sont que simplement fredonnées, à peine esquissées en toile de fond, ou tout bonnement parodiées dans le film.
En réalité, la structure même de Tous en scène rappelle deux oeuvres qui l'ont précédé. La première, c'est la comédie musicale, puis son long métrage dérivé, Mamma Mia !. En 1999, l'artiste anglaise Catherine Johnson imagine une histoire insolite construite autour des plus emblématiques tubes du groupe pop suédois ABBA. Alors que les textes des chansons n'ont au départ aucun réel lien entre eux, la comédie musicale réussit à être extrêmement festive, tout en rendant crédible l'intégration des chansons de ABBA tout au long de la représentation. Cependant, si Tous en scène réussit également à entraîner son auditoire dans son furieux spectacle musical, le long métrage n'atteint cependant pas la même crédibilité autour de son scénario. C'est sur ce point précis que Tous en scène remémore inévitablement une autre oeuvre anglophone populaire, la série télévisée Glee. Créée en 2009 par Ian Brennan, Brad Falchuk et Ryan Murphy, et diffusée six années durant, la série mettait en scène un club de chant qui réunissait la plupart des laissés-pour-compte de leur lycée. Mais chacun d'eux avait une aptitude unique, une magnifique voix. Contre vents et marées, surtout face à l'antipathique Sue Sylvester, le Glee Club finissait par remporter tous les suffrages. Mais si les innombrables chansons ont fait le succès de la série, son scénario souffrait des mêmes problèmes qu'on retrouve répliquées dans Tous en scène.
Chaque épisode de la série Glee bâtissait son intrigue autour d'une sélection musicale, la trame principale s'adaptant ensuite autour quitte à se révéler peu crédible, voire absurde. Si la formule fonctionne à merveille dès les premiers épisodes, le temps de l'illusion de profondeur du programme qui balance peut être un peu trop tôt les plus gros tubes musicaux, elle s'essouffle complètement par la suite. Glee se contente ensuite de ronronner en faisant toujours la même chose, mais en ayant réussit à capturer son public dont la seule et unique préoccupation n'était désormais plus que d'entendre les personnages chanter. Aussi étrange que cela paraisse, cette approche est si efficace, malgré ses grosses limites, qu'elle explique l'étonnante longévité du programme télévisé. Tous en scène reprend exactement la même structure narrative à un détail près. L'intrigue globale du long métrage n'est construite qu'en vue d'une seule et unique chose : son final ! Il est indéniable que la réalisation du film prépare les spectateurs à ce grand moment, sans nul doute possible l'unique partie réjouissante de Tous en scène. Car si la récompense est effectivement à la hauteur de ce qu'on attend du film, il faut malheureusement en passer par une heure et demi franchement brouillonne.
Comme toute la structure narrative de Tous en scène repose exclusivement sur la révélation du spectacle final (qui dure à lui seul une demi-heure complète, d'où la durée anormalement longue du film), le studio Illumination Entertainment échafaude une histoire convenue tentant maladroitement de réunir des personnages complètement différents dans ce qui ressemble fort à une émission de téléréalité musicale du pauvre. Là où Tous en scène varie par rapport à la série Glee, c'est au niveau des traitements des personnages. Les artistes de la série télévisée sélectionnaient des chansons, puis s'efforçaient ensuite d'accoler le contenu des paroles à l'ensemble du récit et de ses personnages pour chaque épisode. Tous en scène fait entrer au forceps des chansons à l'intérieur même de chacun des personnages. Chaque animal anthropomorphe a ainsi sa propre chanson. Chaque texte de chaque mélodie est ensuite visualisée, de manière humoristique, à travers un animal particulier qui lui correspond le mieux, quitte à en faire trop (on évitera de se demander quelle allégorie se cache derrière les chanteuses japonaises par exemple). Il en résulte assez vite une effroyable cacophonie sonore entrecoupée, heureusement, de beaux moments de mises en scène évoquant inévitablement les clips musicaux et qui soulagent les tympans.
Du coup, invariablement, on prédit un à un les pauvres retournements de situation artificiels que tente de proposer Tous en scène. En parallèle, on s'ennuie de cette intrigue qui ne semble vouloir aller nulle part, on ne s'attache même pas aux personnages dont le seul intérêt à nos yeux finit par être exclusivement de les voir chanter et se déhancher. Encore heureux, le choix des chansons, qui s'enchaînent de manière frénétique, évite de se sentir lésé car de ce point de vue là, Tous en scène est inévitablement festif. Ce qui permet de passer le temps. Bref, au bout d'une heure et demi de sous-intrigues épuisantes, Tous en scène finit pourtant par révéler son plein potentiel. Sans le moindre temps mort, la dernière demi-heure vaut finalement à elle-seule d'aller voir le film en salle. Par chance, à l'aire du cinéma à domicile, il est même aujourd'hui tout à fait possible de passer l'heure et demi précédente, qui ne sert véritablement à rien, grâce à la magie de la télécommande, pour n'aller directement qu'à l'essentiel ! A ce moment précis, Tous en scène change subitement son fusil d'épaule et en met plein la vue, dans tous les sens du terme.
Dans une furieuse mise en scène parfaitement calibrée, l'ultime acte de Tous en scène fait soudain émerger le spectateur de sa léthargie dans ce qui peut être qualifié de morceau musical d'anthologie. Sans la moindre fausse note et de manière fluide, chacun des personnages principaux monte finalement sur scène pour offrir un spectacle auditif et visuel à la hauteur des espérances. A ce moment précis, tout comme durant toute la demi-heure de ce mémorable final, on oublie absolument où l'on se trouve, en l'occurrence devant un écran, on oublie même l'éprouvante heure et demi qui a précédé ce moment, et on parvient enfin à vibrer à l'unisson avec ce qui se passe à l'écran. Chaque chanson est parfaitement amenée, chaque situation aussi cocasse qu'elle paraisse s'imbrique avec maestria avec le reste, même l'emboîtement des scènes et les sous-intrigues parallèles sont proposées de manière virtuose. Pour sûr, c'est bien là l'unique grand moment de Tous en scène, sa dernière demi-heure, drôle et pleine d'émotions, pour laquelle on ressort finalement satisfait de l'expérience et le coeur en fête. C'est à cet uniquement moment que la magie du film opère, prouvant que Illumination Entertainment maîtrise finalement son sujet et a aussi une excellente connaissance des effets de scènes, ainsi que des codes visuels et narratifs, des plus grands artistes du monde musical.
Pour autant, il faut garder à l'esprit que cette construction maladroite du récit de Tous en scène doit être considérée telle une arme à double tranchant. Certes l'histoire, qui semble dissonante à la première découverte, mène habilement le spectateur vers un indéniable beau final. Mais une fois que l'on a découvert celui-ci, on devient inévitablement réfractaire à l'idée de se refaire le film dans son entier juste pour assister à cet ultime moment. Là où c'est évidemment impossible de le faire au cinéma, rien n'empêche à présent le spectateur de sauter directement à la fin (un chapitre étant justement placé au bon endroit sur les DVD et Blu-ray), réduisant Tous en scène de long métrage maladif à un moyen métrage de luxe ce qui ne peut, de facto, permettre de le considérer comme un classique du cinéma d'animation aussi festif soit-il. Tous en scène n'a tout simplement pas la même ingéniosité narrative que le succulent Mamma Mia !, dont on a véritablement envie de le revoir en entier à chaque fois. Finalement, l'amoncellement de morceaux musicaux (64, pour rappel) est un lourd fardeau à assumer pour Tous en scène dont, en fin de compte, ce sont uniquement les cinq dernières chansons qui font mouches ! Le second opus fera peut-être mieux en 2020 qui sait.
Olivier J.H. Kosinski - 16 mars 2018
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Doublage (Québec - 2016)
Buster Moon : Daniel Picard
Rosita : Aline Pinsonneault
Mike : Sébastien Dhavernas
Ash : Laurence Dauphinais
Eddie : François Trudel
Meena : Alexa-Jeanne Dubé
Johnny : Louis-Philippe Berthiaume
Günther : François Sasseville
Norman : Manuel Tadros
père de Johnny : Normand D'Amour
mère de Meena : Julie Burroughs
Nana Noodleman : Michèle Lituac
grand-père de Meena : Jacques Lavallée
Lance : Alexandre Fortin
Miss Crawley : François Godin
Nana Noodleman : Michèle Lituac
Doublage (France - 2017)
Buster Moon : Patrick Bruel
Rosita : Jenifer
Mike : Vincent Ropion
Eddie : Mark Lesser
Ash : Élodie Martelet
Johnny : Sacha Perez
Günther : Laurent Gerra
Meena : Chloé Renaud
Norman : Loic Houdré
Père de Johnny : Frédéric Souterelle
Richard : Jean-Marc Charrier
Grand-père de Meena : Benoît Allemane
Mère de Meena : Marie-Madeleine Burguet-Le Doze
Grand-mère de Meena : Colette Marie
Lance : Yann Sundberg
Nana Noodleman : Pauline Larrieu
Judith : Anne Plumet
Stan : Franck Gourlat
Surveillant magasin : Sébastien Finck
Bob : Patrick Borg
Sources :
Doublage au Québec
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