Alpha et Oméga est le premier long métrage 3D réalisé par Crest Animation Productions. Il sort au Québec le 17 septembre 2010, puis le 22 février 2011 en France. Le film dispose d'un doublage français et d'un doublage québécois. Si le film reçoit de très mauvaises critiques de la part de la presse, le public lui offre un accueil chaleureux puisqu'il rapporte au studio le double de son budget de production. Succès aidant, quatre suites ont déjà été produites directement en vidéo et d'autres sont en cours de production.
Kate et Humphrey ont beau avoir grandi ensemble, ils n'ont désormais plus grand-chose en commun. Lui est un loup Oméga qui ne vit que pour s'amuser, et elle une louve Alpha dominante aussi disciplinée que directive, qui prendra bientôt la tête du clan. Fille du chef de la meute de l'Ouest, elle doit en plus épouser Garth, futur meneur du clan de l'Est, pour éviter une guerre. Alors que les noces se profilent, Kate et Humphrey sont capturés par les gardes forestiers et emportés à des centaines de kilomètres de leur réserve naturelle. En leur absence, bien des dangers menacent leur meute...
Il existe une expression qui dit que la patience est toujours récompensée. Par contre, elle ne précise jamais la durée exacte pendant laquelle il faut réellement attendre pour obtenir satisfaction. Prenons un exemple avec Richard Rich. Celui-ci est d'abord entré par la petite porte chez Disney en 1971 alors qu'il avait tout juste la vingtaine. Le studio est à cette époque en pleine tourmente suite à la disparition de Walt Disney. Malgré tout, après le départ fracassant de Don Bluth et de nombreux artistes, on lui donne la chance de devenir co-réalisateur pour Rox et Rouky dont la gestation est des plus houleuses puisqu'elle crée un véritable conflit intergénérationnel en interne. Si la critique est sceptique pour ce nouveau film de la génération d'artistes, le long métrage réalise une performance honorable. On retrouve donc Richard Rich à nouveau en tant que co-réalisateur pour le long métrage suivant, Taram et le chaudron magique. Mais la gestation est encore plus houleuse que pour le film précédent, les artistes Disney allant jusqu'à s'affronter entre eux, tandis que les dirigeants ne cessent de voir rouge devant un budget qui ne cesse d'exploser. Sans aucun doute conforté par le flop historique du film en salle, Richard Rich quitte définitivement le studio Disney pour fonder le sien. Dix nouvelles années vont encore s'écouler, sans qu'on n'entende plus vraiment parler de lui. Jusqu'à ce qu'il sorte son premier long métrage en 1994, Le cygne et la Princesse, qui, malheureusement, n'aura aucun succès. Mais le bonhomme va pourtant s'obstiner ! Il va enchaîner sans relâche film sur film, à la qualité plus que médiocre à chaque fois, subissant l'absorption de son studio par un mécène indien qui, pour une raison qu'on ignore, croit fermement en son potentiel. Finalement, contre toutes attentes, le miracle va soudain se produire !
En 2008, le studio subit sa profonde mutation et devient Crest Animation Productions. Son ambition est d'abandonner l'animation 2D au profit de l'animation 3D qui marche désormais bien mieux au box office, tout en se révélant plus rentable. Deux ans plus tard, en 2010 donc, Richard Rich assiste enfin au tout premier grand succès en salle de son studio d'animation, soit 39 ans après avoir débuté sa carrière : Alpha et Oméga. La preuve en ai donc qu'en s'obstinant contre vents et marées, on finit vraiment par triompher ! Mais il faut tout de même ajouter un bémol à cette réussite inattendue : si Alpha et Oméga est le premier, et unique à ce jour, gros succès de Crest Animation Productions, Richard Rich n'en fut ni scénariste, ni réalisateur !! Faut il y voir ici une cause à effet ? Peut-être que oui, peut-être que non. Il n'empêche, sous l'enrobage quelque peu médiocre que laisse à penser au spectateur ce long métrage, Crest Animation Productions propose ici son premier véritable film d'envergure. En toute sincérité, au vu des catastrophes animées pondues pendant deux décennies par ce studio, c'est un vrai soulagement d'avouer qu'il était franchement plus que temps ! Difficile aujourd'hui de comprendre comment Alpha et Oméga a réussit le tour de force d'être équilibré et attachant sur la durée de la projection. Parce qu'effectivement, notre avis et notre perception du film change au fur et à mesure que celui-ci se déroule. Essayons donc d'expliquer cette incohérence manifeste.
Alpha et Oméga part d'un scénario plus ou moins original écrit par Steve Moore et Ben Gluck. Le premier a fait ses premières armes chez Sony Pictures Animation en participant à la réalisation de leur premier film d'animation, Les rebelles de la forêt. Le second vient de chez Disney, où il était entré peu avant les années 2000 afin de contribuer à Dinosaure puis à La ferme se rebelle. Après avoir participé à quelques films pour DisneyToons Studios, on lui offre la réalisation de Frère des ours 2. Il quitte ensuite Disney pour scénariser le film Numéro 9, avant de rejoindre à son tour Crest Animation Productions. Les deux hommes vont imaginer pour Alpha et Oméga une histoire basée sur la structure hiérarchique d'une meute de loup. L'ensemble y est d'ailleurs à peu près fidèle, puisqu'on retrouve bien une meute dominée par un couple de loups alphas et secondé par des loups de rangs inférieurs, les omégas. Mais le film fait tout de même l'impasse sur les rangs intermédiaires. En soit, c'est un choix scénaristique raisonnable puisqu'ils n'ont guère d'importance pour les besoins du film. Ces deux seuls rangs sociaux permettent de construire une histoire classique du même type que celle de La belle et le clochard ou de Les aristochats par exemple. On retrouve aussi dans le long métrage le principe de territorialité, dont les frontières entre les meutes dépendent des proies et de leur abondance. Enfin, le scénario intègre un élément perturbateur qui va déclencher toute l'intrigue : l'homme qui va enlever deux loups pour repeupler un autre région canadienne. C'est d'ailleurs là que va se jouer la plus grande force de Alpha et Oméga ! En combinant tous ces éléments, le film parvient à construire une histoire épique, scindée en deux parties : la première met en scène deux meutes de loups qui s'affrontent pour une question de territoire tandis que l'autre partie du récit va tenter de ramener les deux loups kidnappés chez eux. Les deux histoires se rejoignant bien sûr habilement à la toute fin du film.
Crest Animation Productions part clairement avec un handicap pour son Alpha et Oméga. Son très lourd passif dans l'animation 2D a d'ailleurs de quoi inquiéter n'importe quel spectateur quelque peu avisé. Je tiens ici à vous rassurer, en partie du tout moins et si vous êtes de nature tolérante, car la toute première réalisation intégralement en 3D, stéréoscopique qui plus est, de Crest Animation Productions réussit à offrir quelque chose d'assez potable, ce qui nous change et nous surprend en même temps ! Le long métrage reste d'un bout à l'autre visuellement constant, on ne discerne d'ailleurs pas les plans réalisés à Burbank (Etats-Unis) de ceux réalisés à Bombay (Inde). Pour vous donner un ordre d'idée, on est ici largement au dessus de Roadside Romeo, la co-production indienne avec Disney dont la qualité était exécrable, mais légèrement en dessous de Les rebelles de la forêt qui ne brillait pas pour son aspect visuel. Par ailleurs, Alpha et Oméga propose de très bonnes idées de mises en scène. Il ne se contente pas de recycler constamment les mêmes idées, puisqu'il enchaîne divers moments de tensions, un peu de contemplation et une certaine drôlerie de manière plutôt équilibrée. Alpha et Oméga apporte également des personnages convaincants, judicieusement intégrés au récit, dont un couple de palmipèdes assez cocasse. Pour la partie musicale, Crish Bacon, dont c'est la seconde création pour un film d'animation après Les chimpanzés de l'espace, offre ici une composition de qualité, hétérocycle mais équilibrée, qui a le mérite d'être entendue en arrière plan de la quasi-intégralité du film ! Alpha et Oméga offre même trois chansons pleines d'entrain dont les paroles sont constituées uniquement... d'onomatopées. Il fallait y penser !
Au final, Alpha et Oméga est loin d'être le meilleur film de l'année 2010. Mais quand on a connaissance des très mauvaises réalisations de Crest Animation Productions jusqu'à lui, on ne peut qu'être surpris de voir que le studio a réussit pour la seule fois de sa carrière à offrir un film qui, à défaut d'être visuellement charmant, réussit à être convainquant, épique dans sa construction, palpitant dans les moments de tension et amusant quand il le faut. Bref, on est ici vraiment très loin des grandes productions concurrentes, mais on passe un très bon moment en sa compagnie. Ce qui, à mon avis, mérite de saluer Alpha et Oméga. Malheureusement, chassez le naturel et celui-ci revient au galop. Richard Rich a depuis lors le plus grand mal à se détacher de ce succès inattendu. Il exploite donc jusqu'à plus soif la licence par de multiples séquences sans âmes qui font clairement de l'ombre à ce premier vrai succès de Crest Animation Productions. Un cas d'école à méditer.
Olivier J.H. Kosinski - 12 avril 2016
La lecture des vidéos directement depuis le site nécessite l'installation des cookies "eXperience" et "Catalogue" ainsi que des cookies tiers "Youtube" et "Vimeo". Conformément à la décision de la CNIL datant du 27 juillet 2016, votre consentement est donc nécessaire pour activer cette fonctionnalité.
22 février 2011
DVD Plus de détails
Doublage (Québec - 2010)
Garth : Philippe Martin
Salty : Benoit Éthier
Winston : Patrick Chouinard
Tony : Jacques Lavallée
Eve : Mélanie Laberge
Humphrey : Hugolin Chevrette
Marcel : Denis Mercier
Kate : Aurélie Morgane
Mooch : Frédéric Paquet
Paddy : François Sasseville
Lilly : Eloisa Cervantes
Shakey : Bernard Fortin
Doublage (France - 2010)
Humphrey : Pierre Tessier
Kate : Kelly Marot
Winston : Richard Darbois
Tony : Bernard Tiphaine
Eve : Déborah Perret
Marcel : Michel Mella
Paddy : Bernard Alane
Garth : Denis Laustriat
Lilly : Marie-Eugénie Maréchal
Shakey : Guillaume Lebon
Salty : Thierry Ragueneau
Hutch : Mathieu Buscatto
Can-do : Thierry d'Armor
Sources :
Doublage au Québec
Carton Générique